TAFTA (traité transatlantique) : déclaration de Solidaires Bretagne au CESER

jeudi 10 avril 2014

L’Union syndicale Solidaires de Bretagne ... entend ... alerter les deux assemblées régionales, le Ceser mais aussi le Conseil Régional sur les enjeux et ses dangers du Grand Marché Transatlantique Traité commercial actuellement en cours de négociation entre l’Union Européenne et les États Unis d’Amérique.

Nous pensons qu’il n’est pas possible de discuter de l’avenir de notre région, des solidarités et des dynamiques partagées sans prendre la mesure de l’impact négatif que pourrait avoir ce Traité, et surtout ignorer le mandat de négociation qu’a donné la Commission Européenne, avec l’aval du Conseil Européen et donc de notre Gouvernement, "d’éliminer tous les droits sur le commerce bilatéral, avec l’objectif commun de parvenir à une élimination substantielle des droits de douane dès l’entrée en vigueur et une suppression progressive de tous les tarifs les plus sensibles dans un court laps de temps » .

S’il aboutissait, ce Traité commercial, dans un Grand Marché transatlantique ou (PTCI ou TAFTA : Trans-Atlantic Free Trade Agreement, en anglais serait l’un des accords de libre-échange et de libéralisation de l’investissement les plus importants jamais conclus, représentant la moitié du PIB mondial et le tiers des échanges commerciaux internationaux. 

Ce projet d’accord viendrait surtout s’attaquer aux fondements même de notre démocratie ; les pays signataires devraient mettre leurs lois, règlements et procédures en conformité. Le TAFTA s’appliquerait à tous les pays, imperméable aux alternances politiques.

Actuellement, heureusement, la loi française veille encore. Il en irait autrement si le mandat donné aux négociateurs européens aboutissait à un accord sur le libre échange entre l’U.E. et les États Unis : cet accord offrirait aux entreprises privées des pays signataires le droit d’attaquer une disposition votée, quel que soit le niveau de l’instance décisionnelle (européenne, nationale, régionale, départementale, intercommunale, municipale) jugée attentatoire aux intérêts des dites entreprises. De plus, le différent devrait être tranché non par les instances juridiques ordinaires de l’U.E. ou de l’un de ses pays membres, mais par des tribunaux d’experts privés constitués ad hoc et habilités à infliger de lourdes amendes au gouvernement mis en cause.

Même lorsque les gouvernements gagnent leur procès, ils doivent s’acquitter de frais de justice et de commissions diverses qui atteignent en moyenne 8 millions de dollars par dossier, gaspillés au détriment du citoyen. Ceci pour ne parler que du domaine de l’énergie mais le TAFTA pourrait avoir des conséquences considérables dans bien des domaines (agriculture, énergie, internet, services dont la distribution d’eau et d’électricité, l’éducation, la santé, la recherche, les transports, l’aide aux personnes…).

Ce traité, tel qu’il est envisagé par ses promoteurs, rendrait impossible la capacité décisionnaire des pouvoirs publics à toutes les échelles. Comme d’autres accords bilatéraux signés récemment ou en cours de négociations – notamment l’accord UE-Canada– le TAFTA ne vise pas la suppression des seules barrières douanières, mais également tout ce qui pourrait constituer une entrave aux libres « commerce et investissement » : ainsi, toute norme sanitaire, sociale, environnementale, de sécurité, tout choix de privilégier des filières courtes ou locales, toute protection sociale pourront être considérés comme un frein à la concurrence marchande.

Le TAFTA va donc viser le démantèlement, ou l’affaiblissement, de toute clause administrative, normative, règlementaire ou législative, qui limite les profits des entreprises européennes ou états-uniennes, en fonction de leurs intérêts respectifs. 
Comment pourrions-nous, face aux multinationales qui réclameraient des millions de dollars supporter le coût de ces « procès » sans appel ? Comment envisager une autre issue que la victoire de ces sociétés privées ? 3300 entreprises européennes sont présentes sur le sol américain par le biais de 24000 filiales et 14400 compagnies américaines disposent en Europe d’un réseau de 50800 filiales. Au total, ce sont 75000 sociétés qui pourraient se jeter dans la chasse aux trésors publics !

Solidaires avec d’autres organisations syndicales ou citoyennes souhaite que la Région Bretagne, comme d’autres Régions de France l’ont déjà fait se déclare « Région hors TAFTA » et que le Conseil Régional fasse une démarche auprès du Gouvernement pour que celui-ci retire le mandat de négociation qu’il a accordé à la Commission Européenne, dans le cadre du Grand Marché Transatlantique.

Nous souhaitons également que notre assemblée s’auto-saisisse des enjeux de ce dossier tellement important pour l’avenir de notre région, comme pour celui de notre pays et organise un débat en séance plénière débouchant sur la publication d’un avis régional.