CONTRACTUELS : les conditions de passage en CDI

mercredi 23 mai 2012

Les trois fonctions publiques utilisent et exploitent le travail d’un grand nombre de précaires, à qui on donne les mêmes fonctions que des titulaires, mais dans des conditions très dégradées. Il est de la responsabilité des organisations syndicales de combattre cette précarité. Il faut bien sûr cesser de recruter des précaires pour remplacer des titulaires. Mais il faut aussi assurer l’emploi des non-titulaires en place, qui ne sont pas des salariés-kleenex.

C’est pourquoi, depuis sa fondation, SUD-Education revendique la titularisation des précaires, sans condition. La loi sur « la lutte contre la précarité dans la Fonction Publique » est loin de cet objectif.

Interprétation de la loi du 12/03/2012 par le Rectorat de Rennes, précisé par la note de service ministérielle du 15 mars 2012 :

note de service passage en cdi

Voir aussi nos articles actualisés : octobre 2012, décembre 2013

Passage en CDI des contractuels :

  • Avoir 6 ans de service ETP au cours des 8 dernières années (depuis 2004), pas d’interruption de plus de 4 mois
  • Où avoir plus de 55 ans et 3 ans de service au cours des 4 dernières années (dans les deux cas, doit être calculé de date à date, sans tenir compte des temps partiel qui comptent comme ETP : voir la note ministérielle)
  • Avoir effectué ce service auprès du même service ministériel (EN privé ou public, pas EN + SUP).
  • Sont exclus : les contrats spéciaux, AED/ASEN (surveillant-es)
  • Les contrats à temps partiel donneront des CDI à temps partiel.

Titularisation pour les CDI ou CDD passé en CDI ci dessus :

  • 4 ans de service ETP (ou comme ci dessus ) au cours de 6 dernières années.
  • Avoir effectué ce service auprès du même service ministériel (EN privé ou public, pas EN + SUP).
  • Sur concours réservé pour les cat A.
  • Sur examen (ou VAE) pour les cat B.
  • Recrutement sans concours pour les cat C.
  • Les modalités d’admission (concours, exam, VAE restent encore à définir, les décrets sont attendus, prochaine session 2013).

Pour ceux ayant les 6 ans après le 13/03/2012, assouplissement de la loi de 2005 :

  • Idem passage en CDI des CDD + 6ans.
  • Service saisonnier inclus.
  • Service discontinu compris si pas d’interruption de plus de 4 mois.
  • Temps partiels comptent comme temps plein
  • Portabilité du CDI au sein des différents services ministériels (si embauche par un autre service).

Et concrètement, quel est le sort des contractuels ?

Les établissements scolaires accueillent de plus en plus de collègues contractuels pour des périodes plus ou moins longues qui ne nous permettent pas souvent de prendre le temps de les interroger sur la réalité de leurs conditions de travail au-delà de la difficulté à prendre en charge des élèves sans formation préalable.

Si nous prenions ce temps, une interview pourrait ressembler à ça :

« - Qu’est-ce qui définit le mieux la condition de contractuel d’après toi ?


- Le premier point et non le moindre : la précarité.
Tu ne sais jamais si tu vas être appelé. Dans un premier temps, tu es contacté vers le 29 août pour le 1er septembre et tu dois donner ta réponse dans la minute même si le poste proposé est à 120 km de chez toi. Quand tu obtiens un peu d’ancienneté, tu reçois un courrier après le 14 juillet avec une proposition pas toujours intéressante (un temps partiel alors que tu souhaites un plein temps, pas tout près de chez toi, encore !) et tu ne peux joindre personne au rectorat puisqu’il est fermé. Tu n’oses pas refuser le poste par peur de ne pas être rappelé.
Fin août, des postes parfois plus intéressants sont libres mais on te les refuse au titre que tu as déjà accepté l’autre poste.
De même, tu sais que des collègues contractuels ne sont pas repris quand ils approchent des fatidiques 6 ans de contrat, pour ne pas les « CDIser ». Du coup, tu te dis que tu peux être remercié après tous ces sacrifices.


- Le deuxième point : le concours.

Pour être à l’abri de cette précarité, tout le monde te pousse à passer le concours. Or, il y a très peu de place. Il faut également avoir le temps de le préparer, ce qui n’est pas toujours évident quand le chef d’établissement où tu travailles est très exigeant.

- Le troisième point : les difficultés de la condition

lorsque tu travailles en équipe, tu dois t’adapter tous les ans aux pratiques de l’équipe en place. Cela demande une certaine capacité d’adaptation. Il est alors possible de n’être vu par les collègues titulaires que comme un « faisant fonction » et non comme un collègue à part entière. Un autre phénomène arrive parfois : étant donné que le chef d’établissement rédige un avis lors du renouvellement de la demande de poste, il exerce une certaine pression sur le contractuel. Cela oblige ce dernier à se plier à des demandes qu’un titulaire n’accepterait pas. De ce fait, dans une équipe, cela crée des tensions puisque le titulaire reproche au contractuel de tout accepter. Cela entraîne une certaine rivalité. Des collègues titulaires en viennent à chercher la faute chez le contractuel.


- Le quatrième point : l’aspect financier.

Ton salaire est évidemment inférieur à celui des titulaires à expérience égale. De même, tu n’as pas le droit aux frais de déplacement dont bénéficie les TZR, excepté si tu travailles sur deux établissements , dans des communes non limitrophes. Pour les impôts sur le revenu, il peut arriver que tu sois convoqué pour justifier tes frais réels. L’agent peut te reprocher de ne pas avoir déménagé près de ton poste. Or, en une année civile, il m’est arrivé de travailler dans 4 établissements différents, aux quatre coins du département.
Et ce n’est pas tout, cette année, la pré-rentrée étant le 2 septembre, mon contrat n’a démarré qu’à cette date. Cela a permis au Rectorat de gagner un jour de salaire. Mon contrat prend fin à la sortie des élèves et je serai donc indemnisé par le Rectorat (chômage) jusqu’à la fin août. Ainsi, le rectorat m’a retiré une journée de salaire (1er septembre), ne me paiera que des indemnités chômage du 5 juillet au 31 août (gain d’environ 750 €) au lieu d’un salaire et je perds de l’ancienneté (non pas pour le CDI mais pour le traitement). Ils sont rusés !

Pour résumer : on te place loin de chez toi, en t’imposant une quotité horaire, avec parfois des collègues qui ne te considèrent pas comme l’un des leurs, avec un revenu moindre. Et tu gardes l’épée de Damoclès au dessus de ta tête : est-ce que le Rectorat va avoir ordre de ne pas conserver les contractuels susceptibles d’obtenir un CDI ?

Contractuels, c’est vraiment une situation de rêve !