La LOI n° 2012-347 du 12 mars 2012 (dite Loi Sauvadet) : une arnaque de plus !

jeudi 29 mars 2012

Une belle arnaque, cela ne surprendra personne, dans la loi relative à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels de la Fonction publique parue le 12 mars.

La loi Sauvadet découle du protocole signé par les syndicats CGT, CFDT, FO, UNSA, CFTC et CFE-CGC le 31 mars dernier.

La FSU et Solidaires n’ont pas signé le texte.

Sauvadet et Sarkozy l’ont promis, juré, craché, le projet devait être adopté avant la fin de l’hiver ; il a été validé au sénat le 26 janvier, puis est passé en éclair à l’Assemblée nationale ;

la loi est parue au JO le 12 mars.

Elle aurait vocation à résorber la précarité. La belle affaire…
Résorber la précarité ? La prétention n’est pas nouvelle, et la loi Sauvadet n’est qu’un énième plan de contractualisation-titularisation, très partiel, évidemment bien loin d’être acceptable et susceptible d’atteindre son soi-disant objectif.


Renseignements pris auprès du rectorat de Rennes, aucune information sur la procédure que le rectorat appliquera, pas de calendrier prévisionnel pour l’instant, nous suivons les évolutions sur ce sujet.

Le projet de loi Sauvadet

La Fonction Publique emploie plus de 890 000 non titulaires sur 5,3 millions d’agents. Le projet de loi, d’après les projections, déboucherait sur 40 000 ou 50 000 titularisations et sur la CDIsation (contractualisation en CDI) de 100 000 agents.

Seuls 17% des non titulaires sont donc concernés.

Les personnels recrutés en contrats aidés sont notamment exclus des différents dispositifs.

Dans l’Éducation nationale : notre bon Ministère emploie 165 500 non titulaires ; parmi eux 100 000 le sont en contrats aidés et ne sont pas concernés par le projet de loi.

D’autres, contractuels, mais qui travaillent moins de 70% d’un temps plein (les plus précaires donc) sont exclus des dispositifs. Il y a selon le ministère 23561 contractuels enseignants employés dans l’EN, 18215 en CDD, 5346 en CDI et 1000 en tant que vacataires. Sur 10304 agents e n t r a n t d a n s le c h a m p d’application du texte, 9965 seraient éligibles à la titularisation, et 1652 seraient CDIsables .

Dans la loi Sauvadet, on distingue les futurs possibles titulaires et les futurs possibles détenteurs d’un CDI. Le toilettage prévu comprend donc deux volants


1) Un dispositif de titularisation

L’intégration se fera par recrutement réservé (examen professionnel ou concours). Seront éligibles celles et ceux en CDD depuis 4 ans sur une période de référence de six ans (dont deux années effectuées avant le 31 mars 2011). L’accès au recrutement réservé sera possible pendant 4 ans après la promulgation de la loi. Attention, les conditions d’éligibilité doivent être remplies au 31 mars 2011. Autre critère, et non des moindres, la quotité travaillée : il faut être, à la date du 31 mars 2011, employé à 70% d’un temps plein au moins. Voilà qui permet un substantiel écrémage !
Gare toutefois, car répondre aux critères d’éligibilité ne garantit pas la titularisation : « À l’issue des examens et concours […] les jurys établissent par ordre de mérite la liste des candidats déclarés aptes. » art. 4. Comme pour tout concours, les candidats seront classés et c’est le nombre de postes à la clé qui déterminera le nombre réel de titularisations.

2) Un dispositif de CDIsation

Il faudra être en CDD à la date de publication de la loi et avoir bossé six ans sur une période de référence de huit ans précédant cette publication. Léger mieux par rapport à ce qui existait depuis 2005, puisque les interruptions de moins de quatre mois ne seront plus désormais un obstacle pour la contractualisation.
Contre la précarité, le CDI ?
Le CDI a été introduit en 2005, (loi Dutreil) pour mettre en conformité le droit de la Fonction Publique avec une directive européenne datée de 1999 (la législation prévoit qu’un agent ne peut pas travailler plus de six ans en CDD. Au bout de ces six ans, il lui faut donc décrocher un CDI). Force est de constater d’emblée que la CDIsation est restée depuis 2005 un phénomène marginal. Le Ministère dénombrait en 2009 5135 CDI, contre 6000 en 2008. Remplir les critères (continuité des contrats, type de support d’emplois - emplois permanents, alors que beaucoup de contractuels étaient recrutés officiellement sous des contrats non permanents) n’a pas été une mince
affaire.

On voudrait faire croire que la CDIsation constitue un rempart contre la précarité. Certes, elle peut apporter des améliorations par rapport à l’existant, c’est-à-dire au pire (CDD ou vacation) lorsque le CDI est à plein temps - fin de contrat (indemnités de licenciement…) ou progression de la rémunération – quoi que celle-ci ne soit pas entérinée au sein de l’Éducation nationale.
Mais être en CDI, ce n’est pas avoir un emploi et un salaire garantis ; on est attaché à un poste, et le contrat peut être rompu si le poste disparaît. Euh… combien de postes supprimés, déjà, depuis 2007 ??
Le CDI peut aussi être conclu à temps partiel (cela n’est d’ailleurs pas l’apanage de la seule Fonction Publique, MacDo emploie la majorité de ses salariés en CDI à temps partiel, à moins de 600 euros par mois !) ; alors, il n’offre pas un salaire suffisant pour vivre décemment. Dans l’Éducation nationale, les abaissements forcés de quotité, sous peine de licenciement, existent bel et bien.

Non aux prétendus plans de résorption de la précarité !

Le propre des plans successifs de résorption de la précarité, c’est d’éponger une partie des précaires, triés sur le tas. Une fois quelques milliers sortis du lot, la grande majorité d’entre eux va continuer à bosser dans les mêmes conditions de travail et de revenu jusqu’au prochain plan de titularisation.

SUD éducation est opposé aux « nouvelles mesures de titularisation », qui ne sont que des outils temporaires de sélection des précaires, seule une minorité étant en fin de compte titularisée. Une titularisation digne de ce nom supposerait des créations de postes à hauteur des besoins. On en est loin !

Nous sommes aussi opposés à la prétendue amélioration d’emploi que constitue la CDIsation, qui créé un régime à deux vitesses, et retarde ou empêche la titularisation de nos collègues.
Seule la titularisation garantit véritablement le réemploi et le salaire, et satisfait l’exigence d’égalité salariale.

A travail égal, salaire égal !

Titulaires ou non titulaires, nous exerçons tous le même métier. Une seule règle doit donc prévaloir : à travail égal, salaire égal et statut égal.

La majorité des syndicats arguent pourtant qu’il serait nécessaire de vérifier, avant de les introniser dans la profession statutairement, l’aptitude et le niveau de nos collègues non titulaires. Il leur faudrait « faire leurs preuves »... alors que depuis des années ils bouchent les trous et exercent le même travail que les titulaires : 80 000 postes ont été supprimés en cinq ans, et notre employeur doit bien pallier les manques ; pour ce faire, il pioche chaque année dans le bouquet vivace des précaires.
Or si ces collègues sont d’ores et déjà employés et bien souvent réemployés – dans la FPE, 45% des non titulaires employés en 2003 y travaillaient encore en 2007, 1/4 d’entre eux seulement ayant été titularisés- c’est bien qu’ils ont répondu à des exigences en termes de qualifications (donc de niveau) mais aussi qu’ils donnent satisfaction (le cas échéant, notre hiérarchie n’aurait eu aucun mal à s’en débarrasser vite fait bien fait).

De plus, le concours n’est rien d’autre qu’un mode de sélection : il classe les candidats et détermine les admis en fonction du nombre de postes disponibles. Le niveau n’a donc pas grand-chose à voir avec le schmilblick, et l’argument ne tient pas.

Pour preuve s’il en faut, la récente réforme du recrutement et de la formation, la mastérisation. Le niveau de qualification exigé pour être prof a été relevé à Bac +5 ; les reçus collés (titulaires d’un master mais recalés au concours, ou l’inverse) ont été recrutés à la rentrée dernière faute de titulaires en nombre suffisant, notamment pour le remplacement.

Pour Sud éducation, il n’y a pas trente six solutions : il faut créer les postes nécessaires et titulariser immédiatement tous les précaires. Les deux vont de pair.

Seule la lutte payera : contre la précarité, mobilisation !

Pour Sud éducation, seule la titularisation massive et sans conditions de tous les précaires, sur des postes statutaires, résorbera la précarité.

Reste qu’il serait fort étonnant que nos vœux soient miraculeusement exaucés et que postes et titularisations tombent du ciel par milliers. Il nous appartient de nous organiser pour construire le rapport de force qui imposera la satisfaction de nos revendications.

Aujourd’hui, c’est bien la lutte des premiers concernés, avec le soutien des titulaires, pour la titularisation, le rétablissement de postes supprimés, les créations de postes nécessaires, qui viendra à bout de la précarité. D’un côté, on annonce un plan de titularisation. Et de l’autre, tout début janvier, la création de 10 000 CUI – CAE de plus dans l’Éducation nationale (contrats aidés qui ont remplacé les CAE depuis le 1er janvier 2010), essentiellement destinés à la vie scolaire dans le second degré. Ils sont conclus « pour une durée maximale de six mois », afin de « favoriser le retour des chômeurs sur le marché du travail » ; ce sont des contrats de 26 heures hebdomadaires en général, payés au SMIC horaire… les « heureux » bénéficiaires survivent ainsi avec des miettes (820 € de salaire mensuel) ou sont forcés de cumuler avec un autre emploi.

On se souvient d’ailleurs peut-être qu’en septembre dernier, une grande partie des CUI avaient appris qu’ils ne seraient pas réemployés faute d’enveloppe budgétaire suffisante. Retournement de veste, élections présidentielles prochaines obligent (3 millions de chômeurs, ça ferait un peu tache…), et hop recrutement dans l’urgence de 50 000 contrats aidés pour le premier semestre 2012 dans l’Éducation nationale. Pas les mêmes bien évidemment que les non reconduits précédemment, qui ne remplissent plus les critères et ont été jetés comme des merdes alors que certains s’organisaient pour que leur contrat soit reconduit. Non, aujourd’hui, on en recrute de nouveaux.


Alors, la précarité c’est fini ?? Mon CUI !

Turn-over permanent, aucune garantie de réemploi, aucune perspective professionnelle quelconque, des droits aux allocations chômage temporaires et misérables… il serait peut-être temps d’en parler, de la résorption de la précarité, pour ces personnels parmi les plus précaires !!

La précarité traverse l’ensemble du salariat. Et les précaires (celles et ceux qui bossent pour des salaires de misère, qui travaillent à temps partiel non choisi ou qui survivent avec les minima sociaux) sont aujourd’hui les premières victimes des mesures de rigueur qui frappent les peuples. C’est à eux de se serrer la ceinture.
Et nos gouvernants de pointer du doigt la fraude sociale, le manque de contrôle de la recherche d’emploi. Ils mettent les RSAstes le pied à l’étrier, 7 heures par semaine, payées des miettes. On propose même un référendum pour priver de revenu les chômeurs qui n’accepteraient pas une première offre d’emploi.

Contre la précarité et la gestion organisée de la misère, la titularisation dans la Fonction publique mais aussi la garantie d’un revenu pour toutes et tous avec ou sans emploi, au minimum égal au SMIC (exigence portée par les mouvements de chômeurs et précaires) sont des revendications centrales que les luttes doivent permettre de satisfaire.